On entend de tout, depuis quelques années, sur les ingrédients à éviter, ceux qui, potentiellement, causeraient la perte de votre beauté épidermique, catastrophes de salle de bain, petits fouteurs de merde intégrés dans des formulations pourtant bien foutues.
C'est à qui trouvera le meilleur coupable, celui qui pointé du doigt, n'aura plus qu'à subir la mauvaise réputation qui va avec la sanction populaire : tu es un petit minable qui ne sert à rien dans mes produits de soins, dégage.
Pourtant, rien qu'en me basant sur des tests personnels, le fameux empirisme (comme à l'époque le compère qui tombait dans les fougères en ayant goûté une plante mortelle, le voisin ne voulant pas perpétuer la même erreur. Toute faute implique une leçon, un nivellement vers le haut à terme), je me suis mise à avoir une opinion sur ce que j'utilise.
Définitivement, j'aurais pu m'y perde, dans cet imbroglio, cette jungle, on trouve des affirmations qui se balancent à tout va sans réellement savoir si le "sans machin truc" a vraiment du sens, ou si "le naturel vaut mieux que le chimique".
Dans la pratique, il y a quelques années, j'aurais sûrement fait le raccourci. De dire que ce qui est tiré du cul d'une plante vaut forcément mieux qu'une substance se baladant dans une éprouvette.
C'est là qu'on retrouve une idée fortement ancrée dans la croyance populaire : les hommes scientifiques sont les représentants du mal, au service de l'humain (contre le naturel), quand ceux qui brandissent une tige de laurier se font une gloire de roi comme à la fin d'un combat rondement mené.
GAME OVER.
Je ne vais pas re-parler de mon avis sur le bio, et de pourquoi cette ambivalence dans le marché des cosmétiques contemporains me convient tout à fait (je suis la reine du mix, pas besoin de carte, je fais ma popote et me crée des listes pour identifier ce qui fait réagir ma peau, quelle que soit son origine); je voulais juste entamer une petite revue non scientifique sur la problématique des composants "occlusifs" exclus pour cause de gros tapage.
Et aussi apprendre à regarder plus loin qu'un seul ingrédient se baladant nonchalamment comme un petit padawan pompant sur son cigare.
Des ingrédients comédogènes/occlusifs
NB : pour rappel, la mention "non comédogène" ne rime à rien, elle sert juste à rassurer le client sur un produit, mais elle ne garantit pas une non-pullulance programmée. Faut tester. (Gloire aux échantillons grattés en pharmacie en faisant les yeux du chat de Shrek)
Les ingrédients peuvent avoir un potentiel comédogène, quelle que soit leur origine. Cela peut dépendre de leur richesse (huile d'avocat sur une peau grasse : c'est tendu), de leur caractère filmogène, des saisons (ce qui fait un effet "manteau" passe souvent mieux en hiver, tous types de peaux confondus), de leur association avec d'autres soins dans la routine, etc.
Là où ça devient intéressant, c'est quand on observe que la majorité des gens pensent que ce qui est chimique génère plus de bubons que ce qui ne l'est pas.
Faux :
- il existe des ingrédients naturels qui ont un potentiel comédogène élevé : les cires naturelles et animales, certaines huiles végétales, beurres végétaux, certaines huiles essentielles pouvant augmenter la réactivité de la peau/leur sensibilité
- l'activité d'un produit naturel peut être "néfaste" sur certaines personnes : réaction boutonneuse en ayant voulu passer à du tout bio/naturel ==> routine bien plus active
Dans l'industrie cosmétique conventionnelle on pointe souvent les silicones, l'huile de paraffine, car largement utilisés :
- ces substances sont inactives, ce qui veut dire qu'elles n'apportent rien à la peau en terme de bienfaits nets (contrairement à ce qui contient des nutriments, acides gras essentiels à la bonne hydratation de la peau)
- elles ont un rôle protecteur (moins élevé pour les silicones, très élevé pour la paraffine) : elle peuvent donc également contribuer à éviter à la peau de se dessécher, notamment lors de traitements médicamenteux contre l'acné
- dans une crème traitante, un silicone peut représenter une bonne balance entre "ce qui traite et inclut une déshydratation" et "la recherche de confort"
L'importance d'une formulation/ne pas regarder à l'ingrédient unique
Si vous êtes plutôt comme moi, à varier naturel/bio/cosmétique conventionnelle ciblée (rarement parfumerie), vous êtes sûrement passé par une étape de grand sectarisme.
Sectarisme de Type 0 (moi maintenant) : tant que ça marche ou "je me fais des listes de ce qui coince, sinon je m'en fous" ou "tant qu'il y a des actifs intéressants".
Sectarisme de Type 1 (le mien, il y a un an et demi) : je bannis tout ce qui est tamponné sur les bidons de wash-wash du supermarché. J'avais intégré par coeur la ribambelle "sans parabens, conservateur, colorants, sulfates, canard flottant", et les marques qui criaient "je suis SANS". Fort bien.
Sectarisme de Type 2 : NON MAIS T'ES DINGUE, tu crois que je suis une fille à me mettre du phenoxyethanol et des filtres chimiques sur le visage ? HU ! Je suis pas une loutre cosmique !
Sectarisme de Type 3 (le plus strict) : Je mets plus rien sur mon visage ni ne le lave, je suis quand même née sans produits de beauté et de maquillage, je vois pas l'intérêt. Et puis ma grand-mère elle se met seulement de la Nivea bleue de temps en temps et elle ressemble à Kim Kardashiante alors qu'elle a 100 ans. Tu peux pas test, goumiche.
Je me suis calmée. Parce que, de moi-même, j'ai compris que les ingrédients inactifs les plus connus N'AVAIENT RIEN DE NOCIF (pour l'humain), et que j'ai toujours du mal quand j'entends "oui mais tu sais, les silicones étouffent, ta peau sue dans le mauvais sens".
Déjà, non, ça dépend du silicone, certains s'accumulent (comme le dimethicone) alors que le cyclopentasiloxane souvent utilisé chez Avène par exemple est "volatil" (ou en tout cas poids plume). Voir cet article du cosmétologue
Etant donné que j'arrive à faire une balance entre mes produits, je m'y retrouve une fois maquillée vu que je ne superpose pas une multitude de couches, et ce n'est pas un dimethicone par-ci par-là qui va enrayer la machine.
Quantité/position de l'ingrédient
Là où ça devient problématique, et c'est valable pour les deux camps cosmétiques, c'est quand on exagère sur la quantité d'ingrédients filmogènes utilisés matin et soir, qu'on se tartine de bio oil en sérum et qu'on enchaîne sur du beurre de karité pour hydrater par exemple (HAHA, je souffre en écrivant cette phrase).
Il faut essayer de faire attention à la place des ingrédients : si l'huile d'argan vous fait un peu réagir quand elle est en tête de liste, mais qu'elle se trouve sur un nouveau soin après la troisième ou quatrième place, les peaux chiantes et de sectarisme de type 2 seront contentes.
Je conseille d'ailleurs de souvent lire la formulation dans son ensemble, un ingrédient n'étant pas seul passager dans un train, il y a des alchimies qui fonctionnent bien (et d'autres qui peuvent craindre, comme l'accumulation d'ingrédients occlusifs), y a que le conducteur et son copilote qui peuvent vraiment foutre la pagaille puissance 1000 en une utilisation (mais en général c'est de l'eau et de la glycérine, donc rien de méchant). Aussi, vous pouvez très bien ne pas supporter une huile essentielle seule mais la tolérer dans un soin de jour, donc on ne peut pas faire de grands débats et affirmations sur, finalement, une expérience qui reste très personnelle.
On peut néanmoins essayer de se diriger dans des cadres pré-établis et se créer sa propre steppe de caribou, avec de bonnes choses à brouter (attention, métaphore power), en piochant dans ce qui nous fait du bien au fur et à mesure des tests cutanés.
N'ayez pas honte/ou ce qu'induit le bannissement du chimique et non du naturel
Il est un phénomène très à la mode qu'induit le "sans-machin-brol", à savoir la honte cosmétique. Par vagues, je lis que certaines personnes se sentent coupables d'utiliser des produits qui ne sont pas "exempts d'un ou deux ingrédients CRACRA", mais qu'elles vont bientôt s'y mettre (même rengaine du côté du fumeur qui promet à son ami super sain d'arrêter dans un futur proche. Hum).
Faut pas avoir honte d'utiliser un produit entièrement chimique, parfois plus "safe" qu'un produit naturel, juste vous poser les bonnes questions : est-il réellement nocif ou seulement inactif/peu actif ? Est-ce que je suis concernée par le problème des perturbateurs endocriniens ? Leur accumulation ? La pollution induite par certaines industries ? L'impact sur la nature ou sur ma peau ? La surpopulation de Caribous ?
Il faut voir jusqu'où votre cheminement de pensée balise vos achats, à partir de là tout sera plus clair et net, rien ne sert de suivre la même routine que Ginette. Si tu aimes ton sérum Lancôme, garde-le.
Reste une chose :
L'importance du démaquillage, avec de préférence un produit bien gras, puis un nettoyant, pour finir d'enlever ce qui part à l'eau. Un visage propre et net est la garantie d'aller se coucher sans se boucher les pores, peu importe ce qu'on a mis sur son visage en journée.
Le mieux, me concernant, reste de faire le choix d'utiliser une crème plus légère au niveau de la compo le soir, et privilégier les silicones le matin, maintenant qu'il commence à faire frisquet.
Chacun gère le positionnement de ses produits comme il le sent, mais la clef est sûrement dans la variation des textures (pas trop de gras sur du gras, pas d'hydratation sans la sceller, etc.)
Finalement, je voulais sortir ma tête du brouhaha pour souffler un peu, parce qu'à mesure que j'avance dans mes recherches, dans mes tests, mes envies coupées par la lecture d'une liste INCI, je remarque que je me cadenasse trop pour ne brusquer personne, ne pas partir dans des débats hors de ma portée.
J'ai toujours affirmé qu'une routine était un tout, comme ce que vous mangez dans une journée vous fait grandir, comme le corps humain ne fonctionne pas sans le sang, ni l'oiseau ne vole sans air.
Faut qu'on saisisse que tout n'est pas si SIMPLE, que j'aimerais que les gens sachent crier sur le bon coupable quand ils boutonnent, mais qu'à force de vouloir isoler les produits, puis leur compo, puis les ingrédients, on va finir par arriver à faire des articles pour parler de la structure moléculaire et dire que le "H" est mal placé et que ça craint.
Donc oui je vais continuer à utiliser des produits conventionnels et bio, parce que ça a du sens pour moi, parce que mon "millefeuille" revisité tient la route, et que j'arrive toujours à trouver un équilibre entre tous les ingrédients que j'utilise.
Mais essayez de voir aussi, de temps en temps, plus loin qu'un seul vilain petit canard dans une liste, the big picture comme on dit.
Avoir le nez trop près d'une feuille fait loucher, tu m'étonnes que t'en perds tes idées claires, Herbert.
Des bisous les Caribous !
La petite liste indicative de beauté pure à garder sous le coude